Chemins en solitaire (eBook)
188 Seiten
Books on Demand (Verlag)
978-2-322-54516-2 (ISBN)
Né à Montbrison en 1949 (Loire), José CASATEJADA réside dans le Forez. Après des études techniques il intègre le monde industriel, de la micromécanique au nucléaire, de la tribologie à l'automobile. Parti du Puy-en-Velay, il s'engage sur le mythique chemin de Compostelle et marche jusqu'au bout de l'Europe. Cette expérience éveille en lui le besoin irrésistible d'aller par monts et par vaux à la rencontre des autres, de partager et d'écrire ses émotions.
Etape 1 : Le mont Gerbier de Jonc – Lac d'Issarlès
Nuages, pluie, neige et brouillard le 25.05.2013
(10 km – 0 à 3 °C)
Lorsque j’ouvre les volets du salon, la fraîcheur humide de la nuit pénètre dans la pièce. J’observe le ciel ; sombre et bas, le plafond nuageux n’offre aucune perspective visuelle. En direction de Saint-Etienne, il réfléchit la lueur orangée des lumières de la ville. Vers l’est, une faible clarté grisâtre marque la pointe du jour. Je conclus à regret que la journée sera maussade.
À six heures trente, le jour levé permet d’entrapercevoir les sommets foréziens. La teinte pâle des « Montagnes du soir » me surprend, car inhabituelle à cette époque de l’année. Je cligne des yeux, scrute l’horizon, aucun doute possible : la neige tombée cette nuit recouvre les reliefs.
Sur le parking, Sylvie et moi attendons Chantal, une voisine, et Christophe, mon fils aîné. Ils avaient souhaité nous accompagner afin d’assister à mon départ du mont Gerbier de Jonc. Le matériel chargé dans le coffre, les portières se ferment, le moteur vrombit.
Nous prenons la direction de Firminy puis la route nationale N88. Vers Yssingeaux, une pluie fine se met à tomber. La morne journée commence. La pluie redouble d’intensité au fur et à mesure que croît l’altitude. Gouttes d’eau et flocons sont mélangés lorsque nous franchissons le col du Pertuis (1 107 m). Des écharpes de brume occultent les sommets des collines et des sucs2 alentour ; un manteau blanc couvre leurs versants jusqu’à mi-hauteur. Le col passé la chaussée devient glissante et de surcroît elle est barrée à Saint-Hostien pour cause de travaux. Nous gagnons Le Monastier-sur-Gazeille par des voies transversales qui doivent être charmantes par beau temps, mais là… Il neige à gros flocons, le bitume blanchit. Plus nous approchons de la station de ski Les Estables, plus il neige dru, plus la couche au sol augmente. Les pneus laissent de profondes traces. Nous croisons deux véhicules sur le toit desquels l’épaisseur de neige avoisine les douze à quinze centimètres. Aux confins du Velay et du Vivarais, ceci ne présage rien de bon quant aux conditions de circulation sur les hauteurs environnantes de cette zone de Haute-Loire. Le patinage incontrôlable des roues, la conduite hasardeuse sans équipements spéciaux, le brouillard désormais de la partie nous mettent en danger. Je gare la voiture six kilomètres avant Les Estables où habitaient les aïeux de Chantal. Ensemble nous consultons l’atlas routier. Descendre en altitude constitue la seule solution en vue de définir un trajet sûr. Nous décidons de rallier la commune de Lac d’Issarlès, en Ardèche. Pour la sécurité de tous j’accomplis un acte que d’aucuns qualifieront d’héroïque : en pleine conscience, je sacrifie une étape.
Nous roulons à vitesse réduite dans la rue centrale du village. Christophe suggère de s’arrêter afin de boire un café. Cette demande inspire une seconde voix qui exprime une envie plus pressante. Une halte s’impose donc au bar le plus proche. Pendant la commande de boissons chaudes chacun se précipite aux toilettes. L’intermède terminé je propose de profiter du temps à marcher en effectuant le tour du lac : acquiescement général !
Je gare la voiture sur l’aire de pique-nique à la sortie du village. Le vent se lève sous un ciel chargé de nuages sombres. Le froid mord mains et visages. Nous nous équipons en conséquence et séance photos avant de partir. Nous nous mettons en marche sur le sentier qui suit la périphérie du lac. À milles mètres d'altitude ses eaux comblent un maar3 profond de cent trente-huit mètres et de cinq kilomètres de circonférence. C’est dire que la promenade devrait durer une heure et demie, tout au plus.
Sur un panneau des informations indique la présence de grottes troglodytes creusées à même la falaise. Jadis, elles ont servi d'habitation et de remise au gardien des lieux.
Nous visitons la première où sont exposés meubles, vêtements, broderies, sabots, outils d’artisans.
Le ciel s'éclaircit au-dessus des croupes enneigées. Alors que nous entrons dans le bois qui longe la rive, un pâle soleil sort d’entre les nues, darde des rayons émoussés. À quelques pas de là une grotte de Massabielle en miniature est aménagée dans la cavité d’un rocher fleuri de bouquets en plastique. Ex-voto marial déposé dans cette anfractuosité en remerciements ou nostalgie de Lourdes ? Mystère… Le tour du lac effectué, nous rallions le bourg.
Pendant que Chantal et Sylvie découvrent les commerces, Christophe et moi partons à la recherche des repères bicolores du GR3. À midi, nous pénétrons dans « Le Panoramic », un restaurant du bourg. Le déjeuner dégusté, nous regagnons le parking. Viennent ensuite les recommandations superfétatoires réconfortantes par le fond sinon par la forme. L’heure de se séparer sonne : embrassades, bises, caresses, tapes amicales sur le dos !
Campé sur mes jambes je reste seul, face au lac. Poussées par la bise, des vaguelettes courent mourir d’un clapotement sec jusqu’au rivage. En dépit du temps monotone, un agréable sentiment de bien-être se manifeste en moi. Un irrépressible bonheur intérieur m’envahit. L’émotion grandit, je ne la retiens pas. Bien que moins intense, pour la seconde fois depuis longtemps, j’éprouve une sensation de liberté qui jaillit du plus profond de mon être. La première fois était lors de mon départ à Compostelle : j’avais hurlé de joie. Je ne crie pas, mais le fait de partir seul à l’aventure me stimule. Heureux, j’effectue de nouveau le tour du lac.
Les ramées des frênes s’ornent de jeunes feuilles décidues4 qui joncheront le sol l’automne venu. Partir seul à l’aventure me stimule. Pour l’heure, elles exhibent le vert tendre dont le printemps les a parées. Les branches des sapins pectinés éparpillés çà et là s’agitent sous les bourrasques. Garnies d’aiguilles vert foncé aux reflets argentés, elles brandissent leurs fleurs brunes isolées en chatons à l'extrémité des rameaux.
La sente rase le bord au plus près. Parfois, le niveau élevé de l’eau la submerge ce qui m’oblige à la contourner. Je grimpe alors dans la futaie jusqu’à ce que je puisse rejoindre le sentier. Au terme de cette marche digestive, je parviens à la rive sablonneuse d’où j’étais parti.
Détendu et d’humeur guillerette, je gagne la longue rue centrale de la localité. La flânerie m’absorbe un moment, mais l’ennui finit par l’emporter. Bien que je supporte la situation avec résignation ce n’est pas ainsi que j’avais imaginé la première étape. Partant du mont Gerbier de Jonc je me faisais une joie de marcher entre sucs vellaves et forêts de conifères avant d’atteindre le lac d’Issarlès.
Vu l’heure il est trop tôt pour me rendre à l’hébergement. Que faire ? L’idée me vient d’appeler Suzy, une femme rencontrée en 2010 sur le chemin de Compostelle5. Elle fut d’abord surprise, car une longue période s’était écoulée depuis notre dernière conversation téléphonique. Puis, l’amitié jacquaire née sur le chemin légendaire prit le pas. Les échanges se firent naturels, enjoués. Je l’informai de mon projet actuel en solitaire, de la météo exécrable, de mon enthousiasme pour ce parcours. Elle m’envie, dit-elle. En ce qui la concerne, Suzy partira demain à destination de Lourdes. Elle accompagnera des malades pendant une semaine. La conversation s’éternise en souvenirs plaisants. D’autres moins, car Suzy nous quitta à Nogaro, Jean-Marc et moi, par suite d’une fracture de fatigue au talon gauche.
Sous un ciel dans lequel soleil et nuages jouent à sautemouton, je parviens à l’asile du soir. Une femme grisonnante, visage fermé, élancée, mise sombre et soignée, m’accueille. De toute évidence ma présence inopinée la surprend. Elle prétend que l’on ne m’attendait plus en raison du mauvais temps qui sévissait ce matin. Il est vrai que j’aurai dû téléphoner cette après-midi afin d’informer les hôtes de ma...
Erscheint lt. Verlag | 16.4.2023 |
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Sprache | französisch |
Themenwelt | Sachbuch/Ratgeber ► Sport |
ISBN-10 | 2-322-54516-3 / 2322545163 |
ISBN-13 | 978-2-322-54516-2 / 9782322545162 |
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Größe: 2,3 MB
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