Les Lointains -  Aurore Bailly Delmas

Les Lointains (eBook)

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2024 | 1. Auflage
332 Seiten
Books on Demand (Verlag)
978-2-322-56688-4 (ISBN)
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Tourner les talons, qui n'en a pas rêvé ? Qui en est seulement capable ? Comment l'extraordinaire peut-il, un jour, renverser la vie d'un homme banal ? Plus qu'un roman, une mise en lumière du phénomène mal connu des disparitions volontaires. Sous couvert d'enquête, ce drame familial à la fois tendre et psychologique a de quoi bouleverser.

1


Dans la venelle exiguë s’entassent des véhicules tous plus impressionnants les uns que les autres. La gendarmerie, appelée en renfort par les pompiers, a dépêché une dizaine d’hommes prestement débarqués en armes d’un fourgon grillagé. Accentuées par des gilets pare-balles, leurs carrures en imposent, renforçant le côté a priori démesuré du dispositif en place. Soudés par un silence contagieux, tous se tiennent prêts.

Tout en donnant le tempo à l’action, un gradé entama l’interrogatoire de deux femmes, lesquelles s’étaient terrées derrière lui :

— Savez-vous où est sa moto ?

— Elle devrait être là, assura Gaëlle en désignant l’angle de la place aux Herbes, sur laquelle donnait une des fenêtres de la bâtisse.

— L’avez-vous cherchée dans les rues avoisinantes ? Il aurait pu la garer plus loin.

— C’est fait, bien sûr. Nous ne l’avons trouvée nulle part. Ce n’est pas faute d’avoir écumé tous les recoins du quartier.

Perle, tétanisée, voyait la situation prendre des proportions imprévues. À voix haute, elle tenta de se rassurer :

— Peut-être est-il parti avec ? Après tout …

L’homme en uniforme ne fit aucun commentaire, poursuivant, imperturbable, sa quête d’informations :

— Est-il suicidaire ?

Dans un élan spontané, Gaëlle émit un « Non ! » vif et puissant qu’elle eut à cœur de justifier auprès de cet étranger :

— Léni et moi avons un petit garçon. Léni n’est pas suicidaire !

Sceptique, le gendarme opina sans grande conviction, de l’expression de celui dont l’expérience a appris que cette raison-là ne retenait pas un homme.

— De quel type d’arme dispose-t-il ? poursuivit l’homme au calot.

— Il a un vieux fusil de chasse. Mon frère est chasseur.

Le gendarme, jusque-alors inexpressif, laissa échapper un rire d’étonnement, s’amusant du drôle de portrait que ce petit bout de femme tirait de son frère. Un marin-chasseur, on aura tout vu!

— Mon père l’était aussi, ajouta Perle précipitamment, souhaitant couper court aux quolibets de son interlocuteur. Ne déviant pas de son propos et consciente de la supposition à laquelle le gendarme voulait en venir, elle tentait de disculper son frère d’un crime contre lui-même.

Emmitouflées dans un pardessus en laine qu’elles se partageaient, sœur et belle-sœur perdaient patience. Gendarmes et pompiers étaient positionnés autour de la maisonnette. Ils étaient prêts. Les voisins, dérangés par la cavalcade des godillots sur les pavés, avaient été sommés de fermer leurs volets. Dans un silence devenu de plomb, que seuls les battements erratiques des cœurs venaient troubler, la mise en scène s’achevait. La petite bâtisse, d’ordinaire paisible et sans grand intérêt, était cernée. Les gyrophares battaient une mesure lumineuse dont le rythme ne demandait plus qu’à être rompu.

Un signe de tête, le mouvement d’un bras qui se lève : coude cassé, direction, action ! Le top départ venait d’être donné.

À quoi s’attendaient-ils ?

Protégée derrière le camion des pompiers le plus en recul de la scène, Perle se tordait les poignets. Moins d’une heure avait suffi à ce que la situation lui échappe.

Elle avait tergiversé longuement, imitant toute la soirée le mouvement hypnotique d’un balancier, tiraillée entre intervenir et faire le pied de grue, ameuter ou patienter encore.

Perle s’était présentée quelques heures plus tôt chez son frère, dont elle avait trouvé la porte obstinément close. La maison arborait des volets intérieurs comme cela se faisait dans les logis d’autrefois. Tous étaient tirés, ne laissant rien deviner de ce qu’ils protégeaient. Perle avait porté trois coups à la porte. Seul le silence avait fait écho à son appel.

De nouveau trois coups, plus pressants. Puis elle été passée à six, plus forts, plus marqués. Même silence. Elle burina une nouvelle fois la porte, avec plus de rythme, plus d’entrain, et finit par tambouriner sur le bois moulé en appelant Léni.

Prenant le léger recul que lui permettait la ruelle sur la maisonnée, Perle constatait qu’une fenêtre de toit du second étage était restée entrebâillée. En Bretagne, soumis au climat marin, on ne laisse pas béantes les fenêtres de toit, à moins de vouloir que le ciel nous tombe sur la tête, littéralement. Perle le savait : quelque chose ne tournait pas rond dans cette maison.

Contrariée, elle avait fait le tour du pâté de maisons à la recherche d’un indice de la présence de son frère. Gaëlle l’avait rejoint alors qu’elle entamait un second tour du quartier en quête de la moto de Léni, habituellement jetée à proximité de l’angle de la rue. Loin d’être une aiguille dans une botte de foin, les deux femmes cherchaient une Harley tape-à-l’œil connue de tous à l’intérieur des remparts. Sans le confier à Gaëlle qui pestait de « lui courir après alors qu’il a oublié son fils à l’école », Perle avait su dès cet instant que quelque chose débutait, ici et maintenant.

En alertant que son frère, censé se trouver dans sa maison d’Intra-Muros ne répondait plus, Perle n’imaginait pas déclencher un tel dispositif.

Vers vingt-trois heures, un pompier régulateur, paraissait-il à moitié endormi, avait recueilli son appel :

— Sapeurs-pompiers d’Ille-et-Vilaine, j’écoute.

— Bonsoir. Je suis devant chez mon frère, il devrait être dans sa maison, mais il ne répond pas et tout est fermé. En fait, je n’ai plus de nouvelles de lui depuis mardi. J’ai essayé de le joindre mille fois, son ex-femme aussi. Tout à l’heure, il ne s’est même pas présenté à l’école pour récupérer son fils. Personne n’a de ses nouvelles, je m’inquiète.

— A-t-il des problèmes de santé ?

— Non, pas particulièrement, bafouilla Perle hésitante, embarrassée que cet aveu ne rende lettre morte son appel à l’aide.

— Quelle est l’adresse de votre frère, madame ? Son nom ?

— Léni Riou. 22, rue du Point du Jour, à Saint-Malo.

— Ah Léni ! Le marin ?

— Oui monsieur, c’est mon frère, vous le connaissez ? Personne ne l’a vu depuis trois jours.

Angoissée, Perle se répétait.

La ville entière connaissait Léni. Il avait hérité sa popularité de son père, jadis figure incontournable des ports malouins. Le pompier régulateur avait reconnu son interlocutrice :

— Perle, c’est Victor Cagnou. Dis-moi, aurait-il pu faire un malaise ou chuter par exemple ?

— Victor !

Perle avait eu de la chance. Tomber ce soir sur l’unique pompier de son répertoire était une aubaine. Cette proximité soudaine l’aida à canaliser sa détresse.

— Non, je ne crois pas qu’il soit souffrant, il a une santé de fer.

Elle jeta un regard interrogateur à Gaëlle, l’oreille collée au téléphone, qui confirma d’un hochement de tête persuasif en tirant sur ses cheveux comme elle avait la détestable manie de le faire à la moindre angoisse.

— Mais il a des escaliers étroits et abrupts chez lui, il aurait pu chuter. Il occupe seul cette maison désormais. Ses volets sont tirés, les voisins m’ont dit qu’ils étaient restés clos plusieurs jours.

— Avez-vous été voir sur son bateau ?

— Bien sûr. C’est même le premier endroit où je me suis rendue. Je peux t’assurer qu’il n’y est pas.

— Je déclenche une intervention. Mes collègues seront là très vite, on vérifiera qu’il va bien. Reste en ligne avec moi en attendant leur arrivée, j’ai d’autres questions à te poser.

Perle avait l’esprit confus. Dans sa tête, un léger grelot l’avertissait d’un danger encore méconnu....

Erscheint lt. Verlag 19.2.2024
Sprache französisch
Themenwelt Literatur
ISBN-10 2-322-56688-8 / 2322566888
ISBN-13 978-2-322-56688-4 / 9782322566884
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