Entre mélancolie et connaissance; Réception créatrice de Proust en Italie

Par le biais de quelques chefs-d’œuvre de la littérature italienne, on retrace les trajectoires créatives que la Recherche ne cesse d’alimenter, devenant le dispositif où puiser les paradigmes nécessaires à l’émergence des poétiques originales. Réception proustienne qui s’épaissit autour de la polarité entre existence et création, s’articulant sur l’ambivalence d’un projet littéraire euphorique dont la poétique réside pourtant dans la mélancolie du résiduel, se dérobant à toute tentative d’organisation dans un cycle existentiel ou dans une summa encyclopédique. Lectures différentes qui prouvent la fécondité d’une parole littéraire agissant sur le lecteur, visant sans cesse et avec allégresse à des nouvelles possibilités　du langage, de la perception, de la pensée.
Une parole qui chez Bassani et Lampedusa multiplie les possibilités narratives du récit de vie, auquel la perspective historique apporte la profondeur de l’enquête rétrospective ainsi que la valeur prophétique d’une narration qui ambitionne à maîtriser le temps. Mais aussi une parole, celle proustienne, stimulant chez Gadda et dans les récits de la jalousie de Moravia et Parise une recherche épistémologique outre que biographique, se concrétisant dans la création d’un style subversif à même d’explorer et de déchiffrer le réel. «Écriture incarnée» qui, inscrivant dans le corps et dans la sensation les possibilités d’une connaissance profonde et transgressive, traduit sur la page la complexité - voire l’obscurité - de ce qui fourmille sous l’épiderme du réel.