Le Christianisme et l'Empire Romain de Néron à Théodose (eBook)
120 Seiten
Books on Demand (Verlag)
978-2-322-44534-9 (ISBN)
Marie Jules Paul Allard né le 15 septembre 1841 à Rouen et mort le 4 décembre 1916 à Senneville-sur-Fécamp, est un archéologue et historien français. Allard a fréquemment contribué à la Revue des questions historiques, dont il devient le rédacteur en chef en 1904, succédant à son fondateur, le marquis de Beaucourt, ainsi qu'à diverses autres publications. En 1874, il a traduit Roma Sotterranea de James Spencer Northcote et de WR Brownlow, y ajoutant de nombreuses notes érudites. Il fut reçu à l'Académie de Rouen le 24 janvier 1873. Il était doyen de l'Académie de Rouen. L'Académie française lui décerne le prix Montyon en 1877, le prix Thiers en 1886 et le prix Bordin en 1903.
CHAPITRE DEUXIÈME. — LE CHRISTIANISME ET L'EMPIRE À
L'ÉPOQUE DES ANTONINS.
§ 1. — Le rescrit de Trajan.
A première vue, il semble qu'une entente eût pu s'établir, au second siècle, entre le christianisme et l'Empire. Rome voit alors se succéder des princes supérieurs par l'intelligence comme par la valeur morale aux deux dynasties qu'elle a déjà usées. La période des Antonins marque le point culminant du régime impérial. Quatre souverains d'une intelligence hors ligne et d'une égale aptitude aux affaires, se remplaçant l'un l'autre, non au hasard de l'hérédité, mais à la suite d'adoptions mûrement réfléchies, gouvernent avec une modération jusque-là sans exemple le monde civilisé. Trajan ; par le sérieux de sa politique, par la continuité de ses desseins, renoue l'ancienne tradition romaine. La légèreté et le scepticisme d'Hadrien restent sans effet sur sa conduite publique et ne l'empêchent de remplir aucun de ses devoirs de souverain. Antonin est simple, laborieux et bon. Marc-Aurèle porte sur le trône les vertus d'un philosophe. Devant des princes si dignes de la comprendre, la religion chrétienne, où toutes les conditions sociales sont maintenant représentées, ne reste pas sans avocats. Elle est désormais sortie de l'ombre, et se sent assez forte pour s'adresser directement à l'opinion des honnêtes gens. Des lettrés ou des philosophes convertis plaident sa cause. Ils essaient moins de dissiper les préjugés du vulgaire que d'éclairer la raison des empereurs. Ceux-ci, après avoir lu leurs écrits, doivent être convaincus de l'innocence et de la loyauté politique des chrétiens. D'autres voix, plus discrètes et plus timides, s'élèvent dans le même temps en leur faveur. Sans intercéder directement pour eux, de hauts magistrats ont laissé entendre qu'il pourrait y avoir quelque excès ou quelque injustice dans la manière dont on les traite. De tous côtés il semble qu'un rapprochement ait été préparé. Mais le rapprochement ne se fera à aucune époque du second siècle. Ni Trajan, ni Hadrien, ni Antonin, ni Marc-Aurèle n'y donneront ouverture. De tant d'efforts et de conjonctures en apparence si favorables une seule chose résultera, due moins à ces efforts eux-mêmes ou à l'apparente faveur des circonstances qu'à l'esprit politique des souverains : plus de clarté, des formes plus précises dans la procédure criminelle appliquée aux sujets de l'Empire accusés de christianisme.
On raconte que Domitien, tout à la fin de son règne, avait fait cesser la persécution dirigée contre l'Église64. Cela ne veut pas dire qu'il ait effacé le principe posé sous Néron, d'après lequel on pouvait être puni comme chrétien65 la profession de christianisme constituant à elle seule un fait délictueux, même sans être accompagnée d'aucun délit. Domitien mit un terme à la persécution, en ce sens qu'il renonça probablement à faire rechercher les chrétiens, ou à soumettre à une épreuve comme celle de la participation forcée au culte de Rome et d'Auguste les gens soupçonnés d'avoir embrassé la religion nouvelle. Mais la proscription générale édictée contre les adorateurs du Christ subsista, comme une sorte d'axiome de droit : selon les circonstances, il fut loisible aux magistrats investis du droit de glaive de condamner un chrétien à cause de sa religion, comme aussi de laisser les fidèles vivre sans être inquiétés.
Un épisode contemporain de Trajan fait comprendre cette situation légale. Il est certain que Trajan ne promulgua aucun édit contre les chrétiens : la lettre de Pline où il est question d'eux, écrite vers 112, le montre clairement. Cependant un fait de martyre est signalé sous son règne66. C'est la condamnation de l'évêque d'Antioche, saint Ignace, envoyé de cette ville à Rome pour y souffrir dans l'amphithéâtre, et, moulu sous la dent des lions, y devenir le froment de Dieu, selon son admirable expression67. L'histoire du voyage, telle qu'elle est donnée dans sa correspondance, nous renseigne sur l'état des chrétiens. Dans les villes asiatiques traversées par le condamné et son escorte, des évêques, des prêtres, des fidèles, soit des lieux mêmes, soit députés par leurs Églises, viennent lui rendre hommage68. Ces démarches ne peuvent être secrètes, puisque Ignace est accompagné d'une troupe de dix soldats, qui le tiennent à la chaîne69 ; cependant, aucun des nombreux visiteurs n'est puni, et deux chrétiens seuls, Zosime et Rufus, probablement arrêtés à Antioche en même temps qu'Ignace, partageront son sort. Rien n'éclaire mieux la position juridique des disciples de l'Évangile : le glaive demeure suspendu sur tous, mais ne s'abat que sur quelques-uns, désignés à la sévérité des magistrats par des circonstances spéciales, telles qu'une émotion populaire ou leur importance personnelle.
Un autre épisode, qui fournit à Trajan l'occasion de s'occuper personnellement des chrétiens, achève de mettre la situation en lumière.
Pline le Jeune avait été chargé, vers l'an 111, du gouvernement de la Bithynie, devenue province impériale. Il s'agissait de remettre de l'ordre dans une vaste contrée, jusque-là mollement administrée, au nom du sénat, par des proconsuls. La nature de cette mission, non moins peut-être que le caractère personnel de Pline, obligeait le nouveau légat à en référer souvent à l'empereur et à prendre ses conseils dans toutes les affaires de quelque importance. Parmi celles-ci, la question chrétienne se manifesta, non tout de suite, mais dans la seconde année de son gouvernement, et motiva de sa part une longue relation, à laquelle Trajan fit une brève réponse70.
Lors du voyage qu'il entreprit, à cette date, dans la partie orientale de la province, Pline fut saisi de plaintes au sujet des chrétiens. On lui fit voir que le christianisme avait déjà jeté, en Bithynie, de profondes et multiples racines. La propagande évangélique avait eu assez de succès dans ces contrées pour y modifier rapidement la vie sociale, et même alarmer sur certains points les intérêts matériels. Non seulement elle s'était exercée dans les villes, centre ordinaire de son action, mais elle s'était de là répandue dans les bourgs, et jusqu'en pleine campagne, et y avait recruté de nombreux adhérents. La proportion numérique des sectateurs des deux religions s'était déjà assez sensiblement altérée pour qu'on désertât les temples, que le culte public parût interrompu, et que les gens qui vivaient du commerce des animaux destinés aux sacrifices se plaignissent de ne trouver plus que de rares acheteurs. Des chrétiens, probablement les plus influents et les plus en vue, furent déférés au légat comme auteurs de ce mal. Pline n'avait jamais assisté, dans sa carrière d'avocat ou de magistrat, à des procès de religion, qui échappaient probablement à la compétence des tribunaux ordinaires pour être jugés par l'empereur ou ses représentants directs. Il ignorait si la procédure dirigée, à Rome ou ailleurs, contre les chrétiens avait révélé à leur charge des actes répréhensibles. Il savait seulement, d'une manière générale, que le christianisme était interdit et que, par conséquent, ses adhérents étaient punissables. Cela suffit à lui dicter sa conduite. Il interrogea à trois reprises chacun des accusés, leur demandant s'ils étaient chrétiens. Ceux qui répondirent affirmativement furent par lui jugés coupables. Sans rechercher s'ils avaient ou non commis dans l'exercice de leur culte quelque délit accessoire, il estima que le fait seul d'être chrétien étant considéré comme illégal, on n'y pouvait persévérer sans opiniâtreté criminelle. Il ordonna donc de mener au supplice quiconque avait confessé le christianisme, à l'exception de ceux qui, s'étant déclarés citoyens romains, devaient, comme tels, être jugés à Rome.
Si la question s'était toujours posée ainsi, Pline n'aurait peut-être pas songé à solliciter l'avis du prince. Son devoir de juge semblait tout tracé, dût son humanité...
Erscheint lt. Verlag | 7.3.2022 |
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Sprache | französisch |
Themenwelt | Geisteswissenschaften ► Geschichte ► Regional- / Ländergeschichte |
ISBN-10 | 2-322-44534-7 / 2322445347 |
ISBN-13 | 978-2-322-44534-9 / 9782322445349 |
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